
L'ETDR
et les 125 TerroT en course !
Histoire d'une rareté au goût d'inachevé


Les performances : Rapide l'ETDR ?
Autant le dire de suite, l'ETDR avec ses 8 cv n'est pas un monstre de puissance et ce même replacée dans le contexte du début des années 50. La puissance représente, néanmoins, un gain de 50 % vis à vis de l'ETD de série, qui rappelons-le est une machine utilitaire !
Avant que mon ETDR ne soit opérationnelle et parfaitement réglée, la seule donnée dont nous disposons au sujet de ses performances réside dans le témoignage de Jacky Boeuf rapporté par FM Dumas dans son livre consacré aux machines du sorcier de Saint Andiol. Jacky Boeuf courut pour les frères Nouguier, notamment sur leur superbe 125cc à deux act.
Selon son témoignage, il en aurait vu une (probablement celle pilotée par Jean Behra) le 14 juillet 1950 à Bedoin qui, selon ses souvenirs, atteignait "à peine 105 km/h" et de rajouter que " [Son] oncle avec son 100 Villiers [passablement préparé quand même] était presque aussi rapide"...
L'ETDR serait donc une machine peu compétitive par nature et vouée à l'échec ?
Tout ceci est à nuancer probablement un peu :
- Le palmarès des ces125 Terrot "usines" est loin d'être ridicule dans le contexte des courses locales (voir onglet "125 TerroT et ETDR en course"), où ces machines arrivent régulièrement dans les premières places si ce n'est à la première elle même, dès leur première année de production qui fut ... aussi la dernière !
- Si l'on prend en compte le coefficient de 15km/h par 1000 tr/min donné dans la doc technique de l'époque, pour atteindre le 105 km/h "dénoncé" par Jacky Boeuf, le moteur devait, théoriquement, tourner à 7000 tr/min.
Or Selon Thierry Philippon, l'ETP de son père préparée avec une culasse et un piston probablement ETDR valait (selon un passage sur banc à l'usine TerroT au tout début des années 60) 7.5cv à 7200 tr/min.
La 125 Nougier en version double act tournait selon Jean Nougier lui-même à 8500 tr/min max pour presque 130 km/h à l'essence/benzol avec un pignon de 16 dents (difficile de compter le nombre de dents de la couronne, faute d'en avoir vu une en vraie pour le moment). Il y a fort à parier que l'ETDR ne puisse tourner à 8500 tr/min même bien réglée car, même modifiée, sa culasse reste bien, a priori, en deçà du dessin de celle de la Nougier (transferts et soupapes à priori plus grands si l'on regarde les photos du livre de FM Dumas), mais il serait bien surprenant qu'elle ne puisse tourner elle aussi à au moins 7500 tr/min, soit une vitesse théorique d'un peu plus de 110 km/h, ce qui est déjà moins ridicule en 1950.
- Rappelons qu'au milieu de 1950, Nougier en est à sa 4ème version de 125cc préparée sur base Terrot-Magnat Debon.
Or l'ETDR, qui n'a existé que quelques mois (début/milieu 1950 à fin janvier 1951 très probablement), manque de développement en particulier au sujet de sa carburation.
Ce dernier point, est crucial si l'on considère les progrès effectués sur la Tenor, sortie 8 ans lus tard, qui possède pourtant des soupapes de même diamètres que l'ETD de série et un diamètre d'admission équivalent à l'ETDR (20 mm). En jouant sur la longueur de pipe, le diamètre de l'admission et le réglage des carburateurs, Padovani transforme, avec les dernières 125cc Terrot, le vieux bloc issu de l'EP de 1946 en une machine de série capable d'un vrai 100/105 km/h (95 km/h pour les versions utilitaires) à la fin des années 50 avec un arbre moins agressif que l'ETDR mais plus "péchu" que l'ETD de série...
L'ETDR aurait certainement mérité un Dellorto SS (comme sur les Nougier) ou un Amac/Amal GP en 22. De même, la culasse des 125 Nougier "compé-client" culbutées possèdent des ressorts en épingles, probablement plus performants que ceux, classiques, montés sur l'ETDR et ce malgré un diamètre et un nombre supérieurs à l'ETD de série.
Enfin, les contraintes liées aux fournisseurs (Magneto France impose ses composants), la pesanteur d'une structure aussi importante que l'entreprise TerroT en 1950 mais dénuée d'un réel service compétition alors, moins souple que le travail d'un génie quasi solitaire comme Jean Nougier (même s'il pouvait compter sur un fournisseur "compréhensif' comme Collignon) aux moyens dérisoires, le tout associé à des actionnaires peu enclins à l'investissement en compétiton (ou tout court même, alors qu'ils ne se "privent" pas en terme de capitaux à ce moment là...) et à une durée d'existence dérisoire pour développer le modèle (probablement moins d'un an !), sont autant d'explications de la rareté et des performances modestes de L'ETDR.
L'ETDR reste tout de même un jalon de l'histoire de la marque dijonnaise et la dernière vraie "compé-client" sortie des usines de la rue André Colomban. Nous avons donc peut-être plutôt à faire à une machine de promotion, ultime tentative de relancer Terrot en course dans une catégorie plus populaire. L'ETDR est peut-être avant tout un projet inachevé...

Eugène Pillot, très élégant sur son ETDR, peut être en juin à Bourges ou en juillet à Mulhouse en 1950.
Dans les deux cas il termine ... 1er ! ( Source photo : site du TCP)